Changer la société à coups de panier

Les amap sont nées en France en 2001. En 2012, il y avait en France 1600 amap pour 273 000 amapiens et depuis le nombre ne cesse d'augmenter. Longtemps présentées comme un frisson de terroir et de bio pour bobos urbains, elles sont en fait un autre moyen de consommer. Par les amap, nos 3 repas  par jour, 4 pour les plus gourmands, deviennent un acte positif au niveau écologique, agricole et social, mais aussi en terme économique et politique.
Bref il est temps de se demander si on ne pourrait pas changer le monde à coups de panier, tout simplement...

Pour une consommation écologique et vertueuse

Bien entendu, les amap transforment l'impact de notre consommation alimentaire. Au lieu d'être néfaste pour l'environnement et les agriculteurs comme l'est la consommation dans la grande distribution, la consommation en amap permet une agriculture écologique et juste que ce soit pour le consommateur, le producteur ou l'environnement comme le montrait l'article Pour une agriculture biologique, locale et juste. Les amap font aussi apparaître une nouvelle forme d'agriculture, l'Agriculture amapienne, différente des agricultures commerciale et vivrière précédentes et moins vertueuses. Dans un autre registre, les amap permettent aussi de réduire nos déchets (Le Panier et la poubelle) ou de lutter contre le changement climatique en réduisant de 70% nos GES alimentaires. Elles permettent enfin de recréer du lien dans une société où les liens entre humains, et entre humains et nature, se sont souvent distendus, pour le moins : Eloge du lien et de la liberté.
Pour tout cela, les amap et le quart de million d'amapiens que compte notre pays sont déjà un changement de société pour ces amapiens. Mais il est possible que le modèle des amap puisse être un moyen plus global de changer notre société.

Un Circuit-court plus juste...

L'amap fait partie de la famille économique des circuits-courts  : «un circuit court est un mode de commercialisation des produits agricoles qui s’exerce soit par la vente directe du producteur au consommateur, soit par la vente indirecte, à condition qu'il n'y ait qu'un seul intermédiaire. » selon la définition légale. Amap, marché, vente à la ferme, drive paysan, livraison à domicile, cueillette en direct ou même vente en distributeur par les paysans sont sans intermédiaire. On considère aussi comme circuit-court quand il n'y a qu'un seul intermédiaire, par exemple quand un restaurant traditionnel ou collectif, type cantine, s'approvisionne auprès d'un agriculteur pour nourrir ses clients.
Quel est l'intérêt de ces circuits-courts en plus de la convivialité, de l'échange, du lien humain...? C'est un circuit économique qui est juste. En effet, dans l'achat de produits alimentaires, il y a le consommateur qui donne son argent pour un produit et le producteur qui a fait le produit et l'échange contre de l'argent. Dans le circuit-court, le producteur touche la totalité du prix de son produit et inversement le consommateur ne donne que le prix de production du produit. L'échange est donc juste.
Dans un circuit classique de distribution, producteur et consommateur ne sont que les deux bouts d'une chaîne qui s'allongent au fil des années, comme le dit la caricature en bas à droite : ils sont de plus en plus nombreux ceux qui vivent indument du travail de l'agriculteur et de l'argent du consommateur. L'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires créé en 2009 par l'Etat livre pour 2012 ce qu'il appelle l'euro alimentaire et qui répond à la question fondamentale : quand j'achète un caddie d'alimentation à 100€, à qui va mon argent? Je vous livre la réponse en diagramme ci-dessous. Première étonnement (un peu feint, certes) : l'agriculteur français ne touche que 8% du prix du caddie alimentaire, 92% du prix allant à tous les autres maillons de la chaîne. Y a-t-il besoin de chercher d'autres explications à la crise agricole?
Un autre éclairage chiffré vient de la comparaison avec un secteur où l'exploitation est notoire et reconnue. Quand Nike sous-traite la fabrication d'une chaussure à 100€ à une entreprise indonésienne, philippinne,... (les chinois sont devenus trop chers), l'entreprise locale touche 6% du prix de vente (12% au total mais 6% sont les matériaux). Ainsi les producteurs de textiles des pays du sud les moins avancés, image même de l'exploitation dans la mondialisation, touche presque pareil que l'agriculteur français (la comparaison se fait avec l'entreprise et non le salarié car un agriculteur est une entreprise et non un salarié, source : Clean Clothes Campaign, cité par Que choisir ? n° 406, juillet-août 2003). 
Ce constat fait, que change le circuit court et plus précisément l'amap si l'on décortique ce diagramme et ses acteurs? Les tâches de transport, commerce, service, industrie agroalimentaire et autres industries sont supprimées et leurs valeurs reviennent à l'agriculteur. Dans le cas d'une amap, qui est donc en bio, on supprime quasiment tous les intrants en tout cas les plus coûteux : pesticides, engrais... Restent encore les semences et un peu de matériel et d'énergie qui peuvent être réduits par une démarche permacole. 
Une amap permet donc de supprimer le coût de tous ces intermédiaires qui n'apportent rien au produit, au producteur et au consommateur pour mieux rémunérer le producteur et pour un coût moindre à qualité comparable pour le consommateur (voir notre comparatif ou l'enquête faite par les Paniers marseillais.)

... Pour un court-circuit salutaire

Du circuit-court au court-circuit, il y a pas que l'on peut et que l'on doit joyeusement franchir. En effet tous ces intermédiaires vus dans le paragraphe précédent entre le producteur et le consommateur n'ont pas de légitimité puisque le circuit-court est possible. On peut considérer que certains rendent des services mais leur rémunération est-elle proportionnée alors qu'elle se fait au détriment du producteur et du consommateur?
Grand distribution et choix.
La grande distribution par exemple explique en long et en large qu'elle a pour rôle de tout mettre à la disposition du client, tous les produits, toutes les marques pour lui offrir la liberté de choisir. Ce choix n'est qu'une apparence : les grandes surfaces proposent en fait un grand nombre de produits semblables avec différents emballages tous issus des mêmes circuits longs et de l'agro-industrie. Cette apparente liberté n'est qu'un zapping organisé d'un produit identique à un autre. Esssayez d'acheter en supermarché un produit différent, genre bio, local et de saison comme tout ce que propose le circuit-court. La combinaison des 3 n'existe pas dans ces magasins car on a véritablement le droit de choisir que parmi les produits d'un système agro-industriel.
Distributeur, producteur et consommateur.
L'autre argument de cette grande distribution que reprend à longueur de temps Michel-Edouard Leclerc, le chevalier blanc de la distribution (et non le Mousquetaire, c'est un autre) est que la grande distribution négocie avec les producteurs et les autres intermédiaires pour obtenir de bons prix pour les consommateurs. Cette phrase est vraie jusqu'aux 3 derniers mots : elle négocie mais pas pour les consommateurs. Elle obtient des prix sacrifiés auprès des producteurs les empêchant de vivre de leur production, pour des prix finaux égaux ou supérieurs aux circuits-courts et, ce, à qualité moindre. Un panier de légume acheté au producteur 0.5€/kg en janvier 2012 est vendu en grande surface 1.6€/kg soit 1.1€/kg qui revient aux intermédiaires soit les 2/3 du prix final alors que le produit n'a subi aucune transformation. En moyenne selon les produits alimentaires la part du prix (marge brute) qui va à la grande surface est de 25 à 30% du prix de vente dont 5% de bénéfice (marge nette finale). (Données Rapport Franceagrimer 2013 pour le parlement). Le chevalier blanc perd ici son déguisement et l'on comprend mieux les résultats de cette grande distribution. Les centres Leclerc ont fait 45 milliards de chiffre d'affaires en 2014 soit environ le PIB de la Bulgarie. Nombre de ses dirigeants de centres sont multimillionnaires (voir l'article).  Quant à la famille Mulliez qui dirige Auchan, elle est la 3 ou 4e fortune de France selon les années. Il semblerait donc que toute cette pression sur les prix producteurs ne soit pas que pour le consommateur.
Un parasitisme moderne.
Ces chiffres montrent ce que l'on pourrait appeler le parasitisme des intermédiaires. En effet, en écologie, sur un chaine alimentaire, un être qui ponctionne sans rien n'apporter s'appelle un parasite et nuit à l'ensemble. La grande distribution n'est pas le seul intermédiaire nocif au producteur et au consommateur. Il existe  aussi des coopératives qui n'appartiennent plus aux agriculteurs souvent et ne leur apportent rien, des centrales d'achat, des courtiers alimentaires qui ont pour fonction d'acheter et de vendre des produits alimentaires et qui en plus empêchent la traçabilité (ils étaient au coeur de l'affaire des très célèbres lasagnes de cheval). L'inutilité de  ces intermédiaires, et donc leur nocivité puisqu'ils se payent sur la chaîne, sont criantes.
Des transformateurs de marge.
Qu'en est-il des intermédiaires transformateurs? Bien sûr ils transforment une matière première en produit intermédiaire ou fini. Il est sûr que je serais embêté avec une betterave sucrière au dessus mon yaourt. Mais les marges sont souvent inacceptables. Un yaourt c'est un petit peu de ferments lactiques, un peu d'énergie et dans l'agroindustrie même pas de main d'oeuvre, donc c'est du lait. Pourtant le prix du lait qui compose plus de 99% du yaourt ne représente que 15% du prix de vente. Les 85% restants sont de la marge : 15 à 20% pour le supermarché (il fait moins de marge sur le yaourt car c'est un produit d'appel dans les comparateurs de prix et que là il négocie avec les grands groupes laitiers, ce qui moins facile qu'avec des producteurs agricoles), un  peu de transport et 60 à 65% pour les grands groupes laitiers. On comprend mieux la richesse de groupes comme Lactalis ou Danone. Produire des yaourts c'est juste faire de la marge sur le prix du lait (alors qu'on peut facilement les faire soi-même). Danone comme d'autres fait encore mieux en produisant de l'eau minérale qui n'est là encore que de la marge en bouteille par exemple.

Où la chaîne des intermédiaires ne s'arrêtera jamais...
Il existe une autre catégorie qui n'est pas à proprement parler un intermédiaire mais qui est rendue inutile par le circuit-court et les amaps : il s'agit de tous les producteurs d'intrants car la production biologique s'en passe. Qui trouve-t-on? Toutes ces firmes charmantes : semenciers, producteurs d'OGM, chimie des engrais ou des pesticides, connues pour l'utilité et leur respect de la vie, c'est-à-dire comme Monsanto, Syngenta, Limagrain (que les français oublient souvent), Bayer et BASF qui produisent des pesticides pour notre alimentation mais que leur humanité ou leur sens du service après-vente fait aussi produire des médicaments pour nous soigner de ce qu'ils nous ont fait manger (voir Bayer-Monsanto : Semence for a bitter life). Dans le même genre mais plus organisée encore, Avril-Sofiprotéol, la société de Xavier Beulin, qui était à la fois dirigeant de la FNSEA et destructeur de l'agriculture, enserre les agriculteurs dans son organigramme les rendants dépendants de ce qu'elle leur vend et de ce qu'elle leur achète (voir FNSEA Beulin Avril Sofiprotéol, et les agriculteurs au milieu).

Hasta siempre la révolution des paniers.
Imaginons un acte qui permette à la fois de détruire l'agro-business, les semenciers producteurs d'OGM, l'industrie chimique, la grande distribution, tous les intermédiaires de l'agro-industrie, les marchands de pesticides, tous leurs lobbyistes qui empêchent nos démocraties de fonctionner, ...
Ce serait un acte révolutionnaire qui changerait la face de notre économie et de notre monde. Cet acte existe et en plus c'est une révolution qui apporte du mieux vivre et du plaisir : il s'agit de consommer dans une amap. A mesure que nous serons plus nombreux à prendre notre panier, ces parasites de notre monde moderne qui le contrôlent, perdront de l'influence et disparaitront. Le capitalisme a fait croire depuis deux siècles qu'économie et politique étaient séparées pour mieux contrôler l'une puis l'autre en vidant le politique de tout pouvoir. Il est donc essentiel, vital et formidablement joyeux de reprendre le pouvoir à coups de panier qu'il soit économique ou politique et ce dans un choix quotidien qui ne nous apporte que du plaisir et de la joie.
Alors court-circuitons joyeusement à coups de panier tous ceux qui font de ce monde ce qu'il est et l'empêche de devenir ce qu'il devrait être!

Et si le court-circuit gagnait l'énergie?

Si l'on veut changer la société à coup de paniers, il ne faut pas mettre que l'alimentation dans son panier. On peut essayer d'étendre notre panier à un autre de nos besoins fondamentaux : l'énergie. Comment peut-on étendre à nos besoins énergétiques le principe de l'amap c'est-à-dire un achat direct, local, écologique et juste, garanti par un contrat librement passé entre deux individus?

Nos besoins énergétiques se divisent en trois domaines : mobilité, chaleur et électricité.

Mobilité et localisme. 
Pour ce qui est de l'énergie consacrée à la mobilité, aux transports, le localisme des amap est en lui-même un élément de réponse. Un aliment acheté en grande distribution fait en moyenne 2400km au cours du long circuit qui va du producteur initial au consommateur (si'l'on tient compte des intrants qui ont permis de le faire pousser, des nombreuses étapes de transformation pour les produits industriels et des transports du produit final). Un aliment acheté en amap à rarement fait plus de 20km. De même consommer en amap ou en local revient à supprimer 1/3 des transports de marchandises terrestres en France et principalement du transport par camion qui est le plus énergivore et le plus polluant. C'est en effet la part que représente le transport de produits alimentaires et agricoles (voir source).  Consommer par une amap permet donc de réduire l'énergie consacrée aux transports d'un tiers.

Chaud le panier, chaud.
Nos besoins en chaleur (chauffage, chauffage de l'eau) peuvent-ils être mis dans un panier? Une autre forme d'amap, plus récente que les amap alimentaires, montre une voie possible, les amap bois comme l'amap Dryade dans la Drôme présentée dans un article de Reporterre. Un sylviculteur est en contrat avec des consommateurs pour les livrer en bois de chauffage. Il a donc géré les forêts, abattu les arbres, séché et débité le bois en bûche, transformé les déchets en plaquettes ( en pellets, c'est plus compliqué) ou même bûches compressées en fonction des besoins de ses amapiens. Il peut les livrer soit en masse en zone rurale pour ceux qui ont de la place ou même de manière fréquente en ville quand il y a peu d'espace de stockage, ce qui est le principal frein au chauffage bois en ville. Comme cela se fait au niveau local, il y a peu de transport à la différence des filières bois actuelles qui sont souvent longue distance. Par exemple, l'explosion des chaudières à granulés ou pellets a transformé l'impact de ce mode de chauffage, au début écologique. Au départ, pellets et plaquettes ont pour fonction d'utiliser les déchets de sylviculture et de scierie pour ne pas gaspiller le bois. Sans eux on ne consomme que la moitié d'un arbre abbatu : le houppier (les branches) n'est pas utilisé et en scierie, écorce et aubier non plus. Tous ces déchets sont donc transformés en bois énergie, le reste du tronc servant au bois d'oeuvre. On utilise ainsi tout l'arbre abattu et chaque partie à bon escient.
Une amap bois permet de remédier à tous ces problèmes et c'est d'autant plus important que le bois énergie, ce n'est plus seulement une ou deux flambées romantiques mais une véritable source d'énergie. Pour une maison bioclimatique, passive ou même seulement bien isolée, le bois est la seule énergie de chauffage nécessaire qui permet de se passer de toutes les énergies fossiles et de l'électricité pour le chauffage alors que celle-ci est encore très négative pour l'environnement en France puisque d'origine nucléaire principalement. Le développement du chauffage électrique en France est très important alors qu'il est presque inexistant dans les autres pays : 1/3 des logements français ont le chauffage électrique contre 5% en Allemagne. Ce développement anormal est d'ailleurs dû au lobby nucléaire, EDF et Etat, en tête, qui a encouragé ce mode de chauffage pour justifier le développement du nucléaire. En effet, chauffage électrique et éclairage urbain sont plus développés en France qu'ailleurs : ils consomment de l'électricité la nuit quand la consommation est moins forte car les centrales nucléaires continuent de produire puisqu'on ne peut les arrêter. Le chauffage électrique représente 55% de la consommation électrique et sans lui le nucléaire devient quasiment inutile. 
On peut donc imaginer sans problème que nos besoins de chauffage soient couverts par une bonne isolation et  par un circuit économique écologique et juste, au lieu du fioul, du gaz ou de l'électricité d'origine nucléaire. Ce n'est pas le lieu ici d'expliquer tous les méfaits de ce nucléaire qui n'est ni propre, ça on le sait, ni juste car il se fait au détriment des populations africaines qui ont la malchance de vivre à proximité des gisements d'uranium exploités par Areva et la France. Il n'a en termes géopolitiques rien à envier aux hydrocarbures et, sans besoin de pétrole ou d'uranium pour nous chauffer, la FranceAfrique dans toutes des dimensions disparaitrait ainsi que le besoin en énergie nucléaire. De même, se passer du gaz russe ou algérien permettrait aussi d'autres relations internationales comme le montre le poids du gaz russe dans la difficulté des Européens à s'opposer à l'agression de l'Ukraine  (Voir Le monde des fossiles se meurt... Bon débarras)
Donc une bonne isolation du bati, un chauffage bois de bonne qualité (pour éviter l'émission de particules) par une amap ou un achat direct et local et voila une grande partie de nos besoins énergétiques couverts en changeant les rapports de domination et de prédation qui organisent le secteur énergétique dans le monde. Encore un court-circuit possible et salutaire.

Et si on court-circuitait l'électricité? 
L'énergie ne sert pas qu'à la chaleur. Il est une autre énergie nécessaire à nos vies modernes (auxquelles il n'est pas question de renoncer) mais simplement de les rendre plus belles et plus écologiques : l'électricité utilisée par nos appareils. Cet usage représente 20% de notre énergie quand chaleur et mobilité sont les 80% restants.   Là encore le premier réflexe est l'économie, pas comme une privation mais comme une amélioration de l'usage. La meilleure source d'énergie est bien sûr celle que l'on n'utilise pas comme le montre la formidable démarche Négawatt. On évite tout d'abord le gaspillage : en France par exemple, 2 réacteurs nucléaires ne fonctionnent que pour l'électricité consommée par la veille des appareils (sur 58 réacteurs). Ensuite on privilégie  l'achat d'appareils économes en énergie (A+++...) et seulement les appareils dont on a vraiment besoin. Par exemple, les 300 recettes du site n'utilisent que 3 appareils électriques : un bon four, un plaque à induction (plus économe que les autres) et un mixer plongeant, qui sont donc les seuls à être utiles dans une cuisine avec une yaourtière (voir Les outils du panier). Même la cafetière électrique est superflue car elle n'est pas la meilleure façon de faire un bon café (voir Un café, l'addition... écologique). Donc très peu d'appareils ce qui permet d'en acheter des bons, économes en énergie et durables. 
On consommera ainsi peu d'électricité que l'on achètera par un système proche de l'amap : un achat direct, local, écologique et juste, garanti par un contrat librement passé et une gestion coopérative. C'est le modèle développé par Enercoop dont le cahier des charges consultable sur son site est proche des principes amapiens. C'est le seul fournisseur d'énergie 100% renouvelable issue de l'hydraulique, de l'éolien, du photovoltaïque ou de biomasse (de petite échelle et écogérée sans quoi la biomasse peut s'avérer problématique comme dans l'exemple des méthaniseurs industriels). L'énergie est produite localement par des producteurs de différentes tailles et chacun peut être à la fois producteur et consommateur. Producteurs et consommateurs sont réunis en coopératives régionales (10 pour la France) et participent chacun avec une voix aux décisions concernant son énergie et la gestion de celle-ci dans sa région. 

Généralisé, ce système mettrait en place un nouveau monde énergétique comme c'est le cas en Allemagne. Celle-ci comme d'autres pays européens a développé la production d'électricité renouvelable sur le modèle des coopératives citoyennes de production énergétique. Les citoyens par exemple s'organisent en association, installent des panneaux photovoltaïques sur leurs toits et consomment et vendent l'électricité produite. Conséquence : en 2015 en Allemagne, 93% de l'électricité renouvelable était produite par des coopératives citoyennes et seulement 7% par les entreprises énergétiques. En France, c'est le modèle entrepreneurial qui a été choisi pour la production de l'électricité renouvelable : une entreprise implante son projet avec l'accord du maire et la relation avec les citoyens s'arrêtent là. Autre conséquence : des projets de grande taille qui visent la rentabilité de la production énergétique au détriment de l'environnement comme les méthaniseurs industriels ou les fermes photovoltaïques qui couvrent des terres agricoles avec l'hypocrisie de s'appeler fermes.

Un nouveau monde énergétique.
L'autre grande vertu que montre bien l'image de Greenpeace qui illustre cet article est qu'elle créé un nouveau modèle énergétique à côté de l'ancien modèle hérité de la Révolution industrielle. Depuis le XIXe siècle et l'utilisation massive des énergies fossiles : charbon, pétrole, gaz, nucléaire, hydrocarbures non conventionnels, l'énergie a toujours été centralisée. Qui possède la ressource énergétique, possède le pouvoir. Cette centralisation est soit privée soit publique dans le cas d'EDF en France. Notre monde actuel s'est construit sur cette centralisation énergétique qui produit des dérives inévitables. L'hyperpuissance économique des compagnies pétrolières ou des états pétroliers, leurs poids politiques qui leur donnent une totale impunité que ce soit pour les entreprises ou les pays. Dans le cas d'EDF en France, la dérive est d'avoir développé une politique énergétique sur le nucléaire depuis les années 70. Elle est  construite sur deux mythes faux : celui d'une énergie propre et celui de l'indépendance énergétique française (alors que tout le combustible nucléaire est importé). Ce mythe nucléaire a des conséquences dans la réalité : construction, entretien et démantèlement des centrales ne sont pas répercutés sur le prix du kilowatt/heure nucléaire (mais payés par l'Etat, par l'impôt) pour cacher le coût réel de cette énergie qui est dans la réalité supérieure aux énergies renouvelables. Si on réintègre ces coûts, le nucléaire est même la source d'énergie la plus chère (voir l'article de Reporterre). On voit cette poursuite aveugle d'un rêve prométhéen et techniciste (pour les ingénieurs le rêve nucléaire est de reproduire une énergie comparable à celle du soleil, au lieu simplement d'utiliser celle du soleil) dans l'entêtement dans des projets déjà morts économiquement et dépassés idéologiquements comme l'EPR de Flamanville ou le projet des deux EPR anglais d'Hinkley Point (même article très complet).  
A côté de ce modèle centralisé de l'énergie qui est à la fois la cause des nos plus grands problèmes géopolitiques, démocratiques et environnementaux, le nouveau modèle énergétique se doit d'être écologique bien sûr mais aussi décentralisé. La décentralisation de l'énergie doit  être mise en place avec les énergies renouvelables qui justement la permettent, au contraire des énergies fossiles. On imagine mal les gens posséder leur centrale nucléaire ou à charbon pour en vendre l'électricité à une coopérative. Pour les énergies renouvelables, c'est possible et c'est même la meilleure solution : des petits producteurs en coopérative comme dans Enercoop. Ainsi, pour un territoire local , l'énergie est produite et consommée par les habitants de manière écologique et ils gèrent eux-mêmes dans la coopérative énergétique leur énergie. Cette solution de proximité permise par les énergies renouvelables court-circuitent complètement le rôle des grands acteurs énergétiques traditionnels, états et entreprises. Ceux-ci l'ont d'ailleurs bien compris et tentent de s'y opposer en favorisant dans ces nouvelles énergies renouvelables les installations industrielles de grande taille (de type fermes solaires développées par des trusts financiers qui "investissent" ou plutôt spéculent dans le solaire)  au lieu de promouvoir la mise en réseau de petites unités de production locales. Ainsi le ministère de l'Environnemnt préfère investir dans le développement de routes solaires avec l'industriel Colas, solution complexe et peu efficace (panneaux horizontaux, facilement salissables ou en surchauffe l'été ce qui nuit à l'efficacité énergétique) plutôt que de favoriser le développement de coopératives de petits producteurs. Encore une fois du centralisé, du beau, du gros, du techno,...

L'énergie peut donc elle aussi rentrer dans mon panier. La consommation alimentaire en amap enlève un tiers de l'énergie consacrée à la mobilité. Un bâti isolé et performant annule presque les besoins en chaleur qui peuvent être couverts par des solutions de type écologique locale et juste. Or mobilité et chaleur représentent 80% de notre énergie. Les 20% d'usage électrique restants peuvent être réduits par la fin du gaspillage, le choix d'appareils efficaces, peu nombreux, choisis en fonction de nos besoins et utilisés à bon escient. De plus cette électricité peut être achetée dans une coopérative de producteurs consommateurs, sorte d'amap de l'énergie qu'est Enercoop ou d'autres coopératives de production énergétique. Tout cela permet  de dessiner un autre modèle énergétique. Ce modèle consomme beaucoup moins pour un confort égal voire amélioré. Ce modèle peut facilement à terme assez court se passer du nucléaire qui sert principalement au chauffage électrique d'un bâti passoire thermique. Ce modèle permet de faire tomber, de court-circuiter les actuels maîtres de l'énergie (états ou entreprises pétrolièrs, nucléaires) et d'éviter tous les problèmes écologiques, géopolitiques ou démocratiques que  causent leurs actions pour maintenir leurs rentes et leurs pouvoirs. Ce modèle permet enfin une démocratie énergétique dans des coopératives de producteurs consommateurs qui gèrent localement une électricité d'origine renouvelable.

Vers un Circuit-court politique et économique : la citérritoire

Alimentation et énergie peuvent donc être assurées par un circuit-court local, écologique et juste dans des contrats réciproques selon le modèle amapien. Un tel système permettrait aussi de court-circuiter toutes les grandes entreprises énergétiques, agroindustrielles, semencières, phytosanitaires et la grande distribution qui sont parmi les plus puissantes, les plus polluantes et les plus influentes par leur lobbying sur nos démocraties. Au niveau écologique, toutes les nuisances générées par leur mode de production, y compris une grande partie des transports sont aussi supprimées.  
Bref ça commence à sentir meilleur dans notre société par cette simple relocalisation et décentralisation des consommations alimentaires et énergétiques... Peut-on aller plus loin dans la relocalisation et la décentralisation?
La relocalisation de l'alimentation et de l'énergie laisse apparaître un nouveau territoire politique et économique. Si je me fournis autour de chez moi en alimentation et en énergie, cette zone qui couvre mes besoins premiers est mon territoire économique principal puisque l'économie ne devrait avoir pour fonction que de couvrir les besoins humains au lieu de créer de la richesse sans couvrir correctement les besoins. Si mes ressources se trouvent dans ce territoire et que ma consommation l'impacte, je dois pouvoir décider de ce qui est fait de ce territoire et donc avoir le pouvoir politique dessus. A cette échelle évidente et en partant des besoins, on retrouve le lien fondamental entre politique et économie que le libéralisme nie pour soustraire l'économie du politique et pour que l'économie puisse ensuite contrôler le politique.

Dessinons ce territoire qui doit couvrir les besoins alimentaires et énergétiques et pour ça un petit tour à Albi. Cette ville de 51 000 habitants a le projet formidable d'être autosuffisante en terme alimentaire (alors qu'elle n'a que 5 jours de réserve alimentaire en 2014 comme toutes les villes). Toute son alimentation devra être produite dans un rayon de 60km autour de la ville en privilégiant bio et circuit-court car plus efficace dans ce modèle de développement. Le projet est détaillé dans un article, sur le site d'Albi en transition et sur celui de la mairie d'Albi. Un tel projet montre combien nos territoires seulement politiques actuels sont obsolètes et inefficaces pour de tels projets. En effet, cette zone de 60km estimée nécessaire à l'approvisionnement de la ville n'est ni la commune, ni la communauté de communes car ces échelons administratifs ne sont qu'urbains et ne suffisent pas comme territoire pour la production agricole (même si l'agriculture urbaine doit jouer son rôle dans le projet). Il faut donc pour la mairie travailler avec toutes les communes avoisinantes, ce qui n'est pas toujours facile mais surtout peut fragiliser le projet à long terme. Si l'on va à l'échelon départemental, l'ensemble est trop grand et n'est souvent pas du tout lié à la zone d'approvisionnement d'une ville. Ainsi Montluçon par exemple et notre amap en particulier puisent autant leurs ressources dans l'est de la Creuse ou le nord du Puy-de-Dôme proches que dans l'Allier.
Le nouveau territoire politique et économique doit donc être une zone centrée sur une ville avec l'espace rural environnant pour produire l'alimentation et l'énergie de tout cet ensemble. La géographie et le langage ont souvent donné une priorité à cet ensemble en parlant d'une métropole et de son territoire, c'est-à-dire d'une ville mère et du territoire qu'elle nourrit et commande. C'est un peu une inversion des rôles car ce n'est pas la ville qui nourrit l'ensemble mais le géographe parle souvent depuis la ville (car si l'histoire est souvent écrite par les vainqueurs, la géographie est trop souvent pensée et construite par les dominants, c'est-à-dire la ville).
Cet ensemble ville campagne était par exemple la constitution des cités grecques antiques comme Athènes. La cité n'est pas la ville mais la ville et son territoire rural pour arriver à une autonomie économique qui lui permettait une indépendance politique. Pour les Grecs profondément ruraux contrairement à l'idée que l'on s'en fait, la campagne était aussi importante. Ainsi les deux grandes fêtes athéniennes étaient les Panathénées qui célébraient la ville, et les mystères d'Eleusis qui célébraient la campagne et plus exactement l'agriculture puisque consacrée à Déméter déesse de l'agriculture et des moissons. Pour les Mystères qui duraient plusieurs jours, l'essentiel des cérémonies consistait en des trajets aller-retour entre Athènes et le sanctuaire d'Eleusis (située à une vingtaine de km) pour montrer le lien entre ville et campagne. 

Les détours par Albi et Athènes permettent de dessiner ce que l'on pourrait appeler une citérritoire. C'est un ensemble ville campagne autonome en termes alimentaire et énergétique. C'est donc un territoire autonome économiquement pour les besoins principaux. Ce doit donc être l'échelon politique principal pour que les populations puissent être maître de leur alimentation et de leur énergie. On aboutit ainsi une citérritoire qui est un vrai circuit-court politique et économique de taille humaine, même si toutes les citérritoires n'ont pas toutes la même taille puisqu'elle dépend de leur population et de ses besoins.

En parlant des besoins, ces citérritoires locales et autonomes politiquement et économiquement sont aussi l'espace de gestion de deux autres besoins pas encore évoqués directement : l'eau et un environnement propre et salubre. Les principes amapiens constitutifs de la citérritoire esquissée règlent quasiment ces deux problèmes. Eau et environnement sont propres grâce à l'agriculture biologique comme le montre le cas de Munich : depuis 1991, toute la zone de captage est en agriculture biologique. La ville bénéficie donc d'une eau pure sans qu'il y ait besoin de la traiter. Quant à la distribution d'une eau propre, elle est simple et doit être prise en charge par un service de la citérritoire, ce qui permet de court-circuiter les multinationales qui gèrent indûment l'eau actuellement puisque c'est un bien commun (beaucoup de villes reprennent actuellement le contrôle de leur eau potable). Les autres sources de pollution, les choix d'énergies, de transport seront gérés politiquement par la citérritoire.
L'intérêt de la citérritoire est cette gestion locale des choix économiques, politiques, alimentaires, agricoles, énergétiques, environnementaux. Elle est plus humaine et plus démocratique redonnant aux populations pouvoir sur leur vie. Ce partage d'un territoire et d'un avenir permet aussi une gestion plus vertueuse dans tous les domaines : j'accepte une nourriture produite dans des conditions environnementales et sociales désastreuses uniquement si cela se fait loin de moi et ne me touche pas. C'est le principe constitutif de la mondialisation : produire loin pour produire mal et pas cher puisque caché. Si ce que vous consommez est produit près de chez vous, on est tout de suite plus sourcilleux sur la manière de produire. Enfin, cette communauté locale responsabilise chacun, redonne l'envie de prendre part et recrée du lien entre les habitants de la citéterritoire.

La citérritoire : lieu de production et de vie

Le contour de la citérritoire est tracé : une territoire rural et urbain, autonome en termes alimentaire, énergétique, et donc économique et politique. Autonome politiquement ne veut pas dire indépendant mais simplement que les principales décisions sur ce territoire sont prises par ce territoire. Il peut ainsi gérer aussi  son alimentation, son économie, son environnement, son eau, son aménagement...
Reste un petit problème : comment la citérritoire, qui est un petit espace, produit-elle suffisament de nourriture et d'énergie pour sa population tout en tenant compte de l'environnement et de la nécessaire descente énergétique qui  va être due à la fin du pétrole?
Pour résoudre ce problème, il faut faire un détour par des concepts venus d'horizon différents. Le premier est celui de mix que l'on entend dans le domaine de l'énergie. Le mix énergétique est l'idée que pour obtenir toute l'énergie nécessaire à une population on ne s'appuie par sur une seule solution massive mais sur de multiples sources d'énergie qui viennent se compléter.
Le deuxième est l'idée centrale de la permaculture que toute chose doit avoir plusieurs fonctions et faire système avec les autres.
Le troisième est celui de paysage comestible qui veut que notre environnement, notre paysage soient orientés vers la production alimentaire et non seulement vers un caractère esthétisant qui veut qu'on ne mette pas de chou dans une plate bande et qu'à l'inverse la production agricole doive être seulement efficace et donc forcément moche.
Combinons ces trois idées et construisons la citérritoire en tant que lieu de production énergétique et alimentaire.

Du mix énergétique de la citérritoire...
Le premier concept de mix énergétique est donc l'idée que toute l'énergie nécessaire à une population doit reposer sur de multiples sources d'énergie qui viennent se compléter. Cette idée de mix doit être appliquée à la citérritoire qui tirera son énergie de toutes les énergies renouvelables présentes localement : bois, soleil, vent, eau et mer, géothermie pour l'essentiel, ce qui laisse suffisament de possibilité dans le cadre d'une consommation vertueuse (bonne isolation, fin du gaspillage, réduction des transports par la relocalisation...). Ce mix  vertueux s'obtient par de petits projets à l'échelle individuelle ou coopérative dont l'impact environnemental est moindre car l'économie d'échelle des grands projets n'est souvent valable que pour l'entrepreneur mais pas pour le territoire. Dans le cadre de la citérritoire, "il faut faire feu de tout bois", c'est-à-dire faire de chaque toit une installation photovoltaïque  par exemple, mettre de petites turbines sur les rivières, beaucoup moins dommageable que les grands barrages. Plein de petits projets reliés dans une ou des coopératives à l'échelle de la citérritoire et gérés par les habitants producteurs et consommateurs.

... Au mix alimentaire.
Cette idée de mix doit être étendue à l'alimentation et à l'agriculture en multipliant les lieux de production alimentaire. Il faut sortir de la vision d'une alimentation produite dans un champ intensif à la campagne et vendu en ville par le supermarché où viennent se fournir urbains et ruraux. Au contraire, il faut penser tous les espaces de la citérritoire : ville, périphérie et campagne comme des lieux de production alimentaire, comme des paysages comestibles pour le bonheur des yeux et des ventres. 

Cultiver les interstices de la ville.
La ville compte de nombreux interstices qu'une agriculture urbaine doit occuper ce qui crééra de la nourriture, des lieux de verdure nécessaires au bien être, des puits de carbone indispensables et luttera contre l'imperméabilisation des sols qui cause inondations et surchauffe urbaine l'été. Parmi ces interstices exploitables, on compte les toits (ce qui en plus isole le batiment en dessous, crée une espace de verdure...). Cela  se fait déjà énormément en Amérique du Nord comme à New-York sur l'image de MacLean ci-dessus. Les friches urbaines, tous ces espaces laissés vides par un ancien batiment détruit, une ligne de chemin de fer désaffectée... sont transformables en jardin de production. Ainsi Rouen va transformer son ancien hippodrome en parc et ferme permacole (voir l'article). De même l'agrocité  de Colombes a développé une ferme urbaine en banlieue parisienne. Les parcs urbains sont aussi vides de toute production alimentaire selon la volonté affichée depuis le XIXe siècle de cacher la production alimentaire. On peut au contraire imaginer que maraichage et  fruitiers reprennent place dans nos parcs ou sur tous ces espaces de pelouses qui selon le panneau sont interdites et donc nous aussi devant leur inutilité. C'est ce que font les Incroyables comestibles en plantant de légumes, les plates-bandes, pelouses et parcs. C'est aussi le projet des Guerilla grafters, des artistes activistes qui regreffent dans les parcs nord-américains tous les arbres possibles en fruitiers. Ainsi l'espace urbain devient aussi un lieu de nourriture partagée.
Enfin, de nombreux espaces urbains vont être libérés dans les villes dans les années à venir avec le recul de la voiture individuelle qui ne peut plus être un mode de déplacement acceptable à l'intérieur des villes. L'utilisation du vélos et des transports en commun va libérer des espaces importants de parking et de routes (non pas en supprimant des axes mais en restreignant leur largeur ou le nombre de voies) qui devront être utilisés comme espaces verts jardinés pour la production alimentaire au lieu d'être utilisés pour rajouter du bati de logement ou de commerce. 
En zone périphérique des villes, les interstices et les zones à reconquérir sont encore plus importants puisque ces zones industrielles ou commerciales ainsi que les zones de grands ensembles d'habitation ont dévoré l'espace rural proche en gâchant de l'espace par des parkings surdimensionnés, des axes routiers dimensionnés pour les migrations pendulaires  de 8h et 18H et vides le reste du temps...
Bref, après "Sous les pavés, la plage", "Sous le goudron, les cardons!".

Densifier une campagne nourricière.
La zone rurale et agricole doit au contraire, elle, gagner en efficacité alimentaire et en densité. La campagne française est en effet consacrée principalement à des champs de céréales ou de protéagineux qui ne servent pas principalement et directement à notre alimentation. De même pour toutes les zones d'élevages dont lait et viande sont trop souvent destinées à l'export. Le contexte de la citérritoire va transformer ces zones rurales autour des villes en campagne nourricière pour le territoire et donc transformer les productions : des légumes, des fruits, des céréales panifiables et une production oléicole pour l'alimentation humaine, un peu d'élevage pour oeufs, laitages, fromages et viande, mais aussi poisson (tous les étangs sont délaissés alors qu'ils pourraient être de vrais lieux de production), tout cela dans l'ordre d'importance et de quantité. Ces productions ne sont pas des grandes cultures mécanisées mais plutot des petites exploitations de polyculture développées en  agriculture biologique, en agroforesterie et en permaculture qui fournissent la ville par amap ou en vente directe. Ce mode de culture et de commercialisation nécessite plus de bras et incite donc à un retour d'installation dans les campagnes de la citérritoire. 

Des productions bio-intensives sur de petits espaces.
Ce mix alimentaire permet ainsi de nourrir sainement, d'avoir une ville plus aérée, plus verte et plus belle, ainsi qu'une campagne plus dense, bref de rééquilibrer ces deux territoires (voire même de les fusionner) et de les relier directement par un même enjeu de production alimentaire et par des échanges directs dans les circuits courts. Ce mix repose sur des agricultures propres, biologiques et bio intensives comme l'agroforesterie (utilisation de l'arbre dans  l'agriculture), l'agroécologie et la permaculture. La ferme du Bec-Hellouin a montré, étude scientifique  à l'appui (Rapport INRA/AgroParisTech téléchargeable sur le site de la ferme), combien cette agriculture était plus efficace que l'agriculture productiviste et chimique et permettait de produire beaucoup sur une petite surface très bien travaillée. Ainsi dans cette étude 1000m² travaillés à la main en permaculture et en biologique produise autant qu'une agriculture conventionnelle avec tracteur sur une surface 10 fois plus grande. Cette production intense sur de petites parcelles correspond bien au mix alimentaire envisagé et permet plus d'emplois. 

Le retour de l'arbre  : quand mix agricole et énergétique se rejoignent.
Autre avantage  : permaculture et agroforesterie réintroduisent l'arbre dans nos campagnes qu'il soit fruitier de la forêt-jardin, pré-verger, haie, bosquet ayant un rôle d'abri agricole ou petite forêt. Ainsi la campagne bien qu'intensément cultivée pour l'alimentation joue son rôle de puits de carbone, de régulation des précipitations, de réservoir de biodiversité mais peut aussi permettre d'avoir du bois comme source d'énergie et comme matériau de construction. Le bois est en effet le meilleur matériau pour toute construction qui se veut écologique et une source d'énergie renouvelable. (voir les services fournis par l'arbre en agriculture)

Ainsi la citérritoire apparait comme un lieu de production efficace puisque qu'il apporte énergie et alimentation tout en améliorant l'environnement et la vie des populations qui peuvent vivre dans des paysages beaux, plein de vie et nourriciers que ce soit en ville ou à la campagne sachant que ces deux espaces sont unifiés par des liens forts et un enjeu commun.

la citérritoire : une terre de liens

J'emprunte le terme de "Terre de liens" à la formidable association du même nom qui "fait pousser des fermes" en installant des agriculteurs en bio dans toute la France. En effet, elle sera certainement un acteur important dans la mise en place de la citérritoire pour recréer un tissu agricole efficace en termes alimentaires et écologiques. Mais surtout car la citérritoire sera réellement une terre de liens. En effet, si ce nouveau territoire devient le territoire le plus important qui gère l'essentiel de nos besoins (alimentation, énergie, eau, environnement propre et beau, matériau...) par de petites solutions faisant système, il est nécessaire de penser ces liens qui feront système, qui rendront interdépendants tous les acteurs et toutes les solutions de la citérritoire.

Autonomie, dépendance et interdépendance.
Le terme d'interdépendance ne doit pas effrayer ceux qui ont été baignés par une idée fausse de l'indépendance mise en avant par notre société individualiste. Les hommes sont faits pour être en liens avec les autres  : l'indépendance, l'absence de lien, n'existe pas, elle ne serait qu'une solitude mortifère. Cette même société individualiste de consommation passe son temps à nous rendre dépendants des objets à nous vendre. En résumé, solitude par rapport aux humains et dépendance par rapport aux choses. 
A l'opposé la dépendance est elle aussi négative puisque c'est un lien subi et qui empêche l'autonomie. L'autonomie, c'est la liberté en acte, la faculté d'agir par soi-même, de faire ses propres choix, de se gouverner par soi-même. L'autonomie ce n'est donc pas l'indépendance, l'absence de liens, mais le fait de choisir ses liens aux autres. Loin d'être opposées, autonomie et interdépendance sont liées. L'interdépendance est l'idée que choses, gens, êtres vivants sont en interactions choisies, sont liés volontairement les uns aux autres, font système ensemble pour exister chacun pleinement, pour connaître un bien-être écologique. Ainsi l'autonomie permet l'interdépendance et l'interdépendance rend l'autonomie plus riche qu'une autosuffisance avec laquelle on la confond souvent à tort.

Une terre de liens économiques : amap, coopératives et monnaie locale.
Une production alimentaire, énergétique dispersée dans la citérritoire telle qu'envisagée précédemment implique de créer des liens économiques au sein de la citérritoire entre producteurs et consommateurs ou entre producteurs disséminés comme dans le cas de l'énergie ou de petites productions agricoles. Il faut donc impérativement garder comme principe le circuit-court qui est la forme d'échange, de lien économique ayant la plus grande efficacité et la plus grande justice. 
Parmi les circuits-courts, les liens durables tels que l'engagement direct par le contrat dans une amap est bien sûr le lien à privilégier car c'est un lien stable, fort et qui permet véritablement de renforcer l'efficacité de l'agriculture (voir l'agriculture amapienne) ou de toute production et de la rendre plus vertueuse.
Les liens directs et l'engagement entre producteurs et consommateurs se retrouvent aussi dans les Scop, société coopérative et participative, ou les Scic, société coopérative à intérêt collectif. Ces coopératives sont tout à fait différentes des grandes coopératives agricoles qui ont été détournées de leur rôle et de leur fonctionnement initiaux au profit d'un fonctionnement classique de société anonyme ou société par actions avec l'intérêt qu'en plus les agriculteurs ne sont pas salariés mais assument seuls les difficultés. En effet, scop et scic conservent le pouvoir aux membres gardant 1 voix par personne, conservent la richesse créée dans l'entreprise (investissement ou salaires au lieu de payer des actionnaires qui retirent l'argent de l'entreprise) et dans le territoire. La Scic permet même d'associer dans l'entreprise en plus des salariés et des usagers les collectivités locales ce qui permettrait à la citérritoire d'être membre des entreprises et de pouvoir participer à des décisions qui engagent le territoire. (Pour plus de renseignements sur ces formes de coopératives, voir l'article). Ces formes de coopérative peuvent être très utiles car elles permettent d'associer de petits producteurs agricoles ou énergétiques avec leurs consommateurs (c'est le cas déjà évoqué d'Enercoop) mais permettent aussi de donner une forme juste à des entreprises ayant ou nécessitant un taille plus grande.

Enfin, vu que l'essentiel des échanges se feront à l'intérieur de la citérritoire, il est important que la richesse créée dans le territoire circule dans le territoire. En effet, notre économie actuelle créée énormément de richesse, d'argent mais celle-ci quitte les territoires qui l'ont créée et  quitte les échanges économiques pour de la thésaurisation, de l'épargne dans des paradis fiscaux. On peut au contraire penser une économie qui fonctionnerait avec peu d'argent mais un argent qui circule rapidement au sein de la citérritoire, sans pouvoir sortir des échanges, ni du territoire. Là encore on retrouve localisme et circuit-court mais dans le domaine financier. C'est le principe des monnaies locales complémentaires qui fleurissent partout. Elles ne remplacent pas la monnaie nationale qui continue pour les échanges longues distances mais localement on installe une monnaie qui est privilégiée pour les échanges locaux. Ceux-ci sont dynamisés puisque l'on dépense localement cette monnaie ce qui conserve la richesse dans le territoire. Ces MLC, monnaies locales complémentaires, fonctionnent déjà dans de nombreuses villes européennes ou françaises. L'exemple le plus connu en est la Bristol Pound qui concerne cette ville anglaise d'un millions d'habitants et que Mélanie Laurent et Cyril Dion ont présenté dans l'enthousiasmant film Demain. Dans une citérritoire aux échanges locaux, cette monnaie locale complémentaire pourrait devenir la monnaie principale pour couvrir toutes les dépenses quotidiennes (alimentation, énergie, eau, impôts locaux...) et aussi être une part importante des salaires. Cela permettrait de réduire  le rôle des monnaies nationales et à travers elles l'impact des financiers dont elles sont l'outil. (Pour plus de renseignements sur les monnaies locales complémentaires, voir le site du réseau des MLC ainsi que la fiche Colibri sur les MLC).
Une monnaie locale, des amap, des coopératives à taille humaine semblent de bonnes bases pour une citérritoire qui serait une terre de liens économiques. Ainsi on refonderait une économie sur des échanges directs, justes permettant de couvrir les besoins de chacun localement et de manière écologique. L'économie pourrait redevenir un lien entre les hommes au lieu de n'être qu'un domaine de prédation.

Une terre de liens politiques
La citérritoire a été définie d'emblée comme le territoire politique principal puisqu'il est à la fois lieu de production et de vie. Il est donc nécessaire de se demander comment gouverner ce territoire de vie. Il ne s'agit pas de rédiger ici une constitution de la citérritoire. En effet, le propre d'une démocratie est qu'on ne la décide pas priori mais que ce sont ses acteurs, ses citoyens qui la constituent au fur et à mesure. On peut toutefois regarder si le principe du circuit-court peut être la base d'un système politique.  
En politique, le circuit-court s'appelle la démocratie directe : les citoyens gouvernent directement et non par l'intermédiaire de représentants comme dans le cas de nos démocraties représentatives. L'antiquité grecque  connaissait en partie la démocratie directe mais nos démocraties modernes fondées aux XVIIIe et XIXe siècles lui ont préféré la démocratie représentative qui permettait de conserver le pouvoir à la bourgeoisie qui venait de le prendre à la noblesse par des révolutions. La première justification de ce refus d'une démocratie directe était le nombre : on ne pouvait faire une démocratie directe avec des millions de citoyens, il fallait donc que ceux-ci se choisissent des représentants par l'élection pour avoir un nombre d'acteurs politiques raisonnables entre deux élections. La seconde justification était la compétence : le peuple n'avait pas la compétence requise pour des décisions importantes et il lui fallait donc se faire représenter par des gens ayant cette compétence. 
Si l'on se place à l'échelle de la citérritoire, ces deux prétextes tombent. La citérritoire est petite et peut permettre une démocratie directe où les citoyens prennent les décisions importantes directement dans des assemblées périodiques. De plus, un outil comme internet peut permettre de simplifier ces assemblées  et le vote des décisions ou la mise en place de référendum citoyens. Le problème de compétence est aussi caduque. Il est peut être difficile de prendre une décision générale et donc abstraite à l'échelle d'un pays mais en ce qui concerne son environnement proche c'est plus facile et concret. 
En dehors des grandes décisions et assemblées périodiques, il faut gouverner au quotidien la citérritoire en gardant le principe de démocratie directe et d'une déconcentration du pouvoir. Le maire français a trop de pouvoir pour devenir celui de la citérritoire qui concentrera l'essentiel de la vie des citoyens. De plus, le maire cache le conseil municipal et bien souvent le contrôle avec  la règle majoritaire française, ce qui rend inopérant cette assemblée municipale. Il faut déconcentrer et donc garder une gouvernance collégiale où la décision se fait par la négociation et le consentement. On peut voir une telle volonté à Saillans, commune de la Drôme qui a mis en place une gouvernance collégiale et participative. Il faut mettre fin à la règle de la majorité si chère à la démocratie française qui ne permet pas de fédérer l'ensemble d'une communauté sur un projet commun (puisque les minoritaires se retrouvent dans l'opposition). (Pour toutes ces réflexions sur la gouvernance et la prise de décision en assemblée, voir). Un tel collège gouvernant la citérritoire peut être désigné par l'élection classique à condition qu'elle soit obligatoire et proportionnelle sans aucune prime majoritaire pour représenter tous et que chacun se retrouve associé à la prise de décision et à l'avenir de la citéterritoire. On peut aussi penser à des élections sans candidat comme dans les principes sociocratiques  : on met un nom sur le bulletin sans que quiconque se soit présenté et ceux qui ont le plus de voix sont élus, ce qui évite toute professionnalisation politicienne. Le tirage au sort d'un collège de citoyens est aussi possible. Très égalitaire et utilisé dans l'Antiquité, le tirage au sort permet d'élire des citoyens pour gouverner. Leur soit-disant manque de compétence est corrigée par la taille de la citérritoire et la collégialité de la fonction. Il faut d'ailleurs remarquer que c'est  le système utilisé pour les jurés d'assise en France et dans de nombreux pays et que, là, on considère qu'ils sont aptes pour rendre justice sur des affaires compliquées. Enfin ces systèmes peuvent être complémentaires avec des assemblées mixtes de tirés au sort pour l'égalité et d'élus pour la performance qui travaillent ensemble, les "spécialistes" devant entraîner le consentement des tirés au sort qui représenteraient les citoyens.
Bref plein de possibles avec un seul principe une démocratie directe et active pour gouverner ensemble ce territoire commun. 

La citérritoire, pensée par et pour le circuit-court, peut donc véritablement devenir une terre de liens entre des individus autonomes et interdépendants qui partagent un même territoire gouverné en commun.

La citérritoire et au-delà? Du local au global.

La citérritoire apparait donc comme un lieu à taille humaine dans lequel l'interdépendance choisie entre les individus est possible. Elle est la base de la vie politique démocratique où les citoyens gèrent leur territoire en commun. Ce territoire a une autonomie alimentaire, énergétique, financière, maîtrise son eau, son environnement, ses déchets dans une gestion vertueuse puisque locale et dont les résultats sont sensibles par les citoyens acteurs. Comment cet échelon local vertueux agit-il sur l'ensemble de la société? Comment passe-t-on du local au global?

Le pouvoir du court-circuit.
Le premier moyen d'action est le court-circuit qui est à la base de la démarche de circuit-court. Si eau, alimentation, énergie, environnement, finance, déchets sont gérés localement en circuit-court, toutes les grandes entreprises de ces domaines que vous connaissez et même que vous ne connaissez pas, disparaissent ou deviennent insignifiantes. Cela libère l'économie mais aussi la politique puisque ces entreprises agissent beaucoup par lobbying empêchant le bon fonctionnement de nos instances démocratiques. 
Même court-circuit au niveau politique : si toutes les décisions concernant ces domaines sont prises localement, les institutions supérieures perdent énormément de pouvoir, de prestige et ne représentent plus le même intérêt. Cela permet de clarifier le personnel politique : ceux qui se présentent pour le pouvoir, le faste ou l'argent,  et qui nuisent à nos démocraties risquent de ne plus se présenter.
Bref la mise en place de citérritoires permettrait de corriger économie et politique par le vide en remettant le pouvoir à son échelon proche et donc contrôlable par les citoyens.

Le débordement : le pouvoir du nombre.
Après le vide, le plein voire le trop plein. L'avantage de cette citérritoire et qu'elle peut se construire à l'initiative des citoyens eux-mêmes tout de suite en consommant dans des amap, créant des scop, des scic , des coopératives énergétiques, des monnaies locales tout ça dans un territoire. Ainsi ce territoire n'est pas défini par une limite administrative mais se définit par les liens qui unissent les individus. La construction formelle, administrative de la citérritoire comme territoire politique peut se faire dans un second temps, une fois le territoire réel construit entre les individus. Ainsi, les initiatives citoyennes peuvent déborder les structures politiques et économiques qui pourraient être opposées à leur perte de pouvoir. En gros, organisons-nous localement par ces différents moyens et nous créérons des citérritoires de fait, qu'il ne restera plus qu'à créer en droit avec des élus locaux, court-circuitant ainsi les décideurs politiques ou économiques d'échelon supérieur. Ainsi cette transformation profonde de notre société peut se faire dans une révolution quotidienne et tranquille par les citoyens eux-mêmes.

La citérritoire comme laboratoire démocratique.
Enfin, cette démocratie locale et active dans laquelle les citoyens exercent le pouvoir en circuit-court dans tous les domaines a une autre vertu. : elle réapprend aux citoyens qu'ils ont le pouvoir et leur permet de se réinvestir dans la vie démocratique. L'abstention et le désintérêt actuels pour la vie démocratique ne s'expliquent pas par un rejet de la démocratie mais par une démocratie représentative distante qui ne permet pas aux citoyens d'agir directement et surtout de voir l'effet de son pouvoir. Le citoyen ne voit pas l'effet de son pouvoir donc ne pense pas avoir de pouvoir. A l'échelon local, le seul encore apprécié par les citoyens, le citoyen voit son pouvoir à l'oeuvre : si je vote pour un abruti ou quelqu'un de bien, ma vie ne sera pas la même dans ma ville. Ainsi la démocratie locale et active de  la citérritoire peut permettre aux citoyens de se réinvestir dans la vie démocratique, même à d'autres échelons.
Outre ce rôle de formation et de dynamisation du citoyen à une démocratie réelle et multidomaines, la citérritoire peut servir de modèle d'organisation pour les échelons supérieurs ou pour les domaines non gérés par la citérritoire. Ainsi les nouvelles pratiques démocratiques de la citérritoire peuvent inspirer les appareils démocratiques nationaux. De même, les formes économiques coopératives doivent être étendues aux institutions culturelles, à l'ensemble des entreprises même de grande taille dans les domaines où elles ne peuvent être remplacées par de petites entreprises locales. Parmi celles-ci, les entreprises dominant internet doivent être aussi de forme coopérative puisque c'est un bien  commun que les populations doivent se réappropprier et un outil fondamental dans le monde interdépendant esquissé.
Mai-juin 2016, révisé décembre 2022
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